Débats
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Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 39e Législature,
Volume 143, Numéro 15

Le mercredi 17 mai 2006
L'honorable Noël A. Kinsella, Président


LE SÉNAT

Le mercredi 17 mai 2006

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

LE MOIS DE LA SENSIBILISATION À LA SCLÉROSE EN PLAQUES

L'honorable Wilbert J. Keon : Honorables sénateurs, à la fin des années 1970, la Société canadienne de la sclérose en plaques a choisi le mois de mai comme Mois de la sensibilisation à la sclérose en plaques au Canada. À cette occasion, les bénévoles et les permanents de tous les échelons de la société organisent diverses activités de sensibilisation.

Le Canada est un des pays du monde où l'incidence de la sclérose en plaques est la plus élevée.

[Traduction]

La sclérose en plaques est une maladie imprévisible, souvent invalidante, du système nerveux central, c'est-à-dire du cerveau et de la moelle épinière. Cette maladie s'attaque à la gaine de myéline qui entoure les fibres nerveuses du système nerveux central, entraînant l'inflammation de cette substance et sa détérioration, par plaques. La forme la plus courante de sclérose en plaques est caractérisée par des poussées clairement définies, suivies de rémissions. Lorsqu'ils posent un diagnostic, les médecins peuvent difficilement prédire l'évolution, la gravité ou les symptômes précis de cette maladie. Il est très difficile pour les personnes atteintes et pour leur famille de vivre avec la sclérose en plaques au quotidien.

On ne connaît pas de cause précise à cette maladie qui se traite, mais ne se guérit pas. On estime à 50 000 le nombre de Canadiens qui ont la sclérose en plaques. Chaque jour, trois Canadiens de plus apprennent qu'ils en sont atteints, et les statistiques placent le Canada au premier rang mondial sous le rapport de l'incidence de cette terrible maladie.

Le Canada est en outre un chef de file dans la recherche sur la sclérose en plaques. Cette prééminence s'explique, selon moi, par le fait que les chercheurs canadiens collaborent entre eux, et même avec d'autres chercheurs ailleurs dans le monde.

Les Drs Brenda Banwell, de l'Hospital for Sick Children, Amit Bar-Or et Douglas Arnold, de l'Institut neurologique de Montréal, et Dessa Sadovnick, de l'Université de la Colombie-Britannique, dirigent une étude sur la sclérose en plaques chez les enfants, menée dans 22 hôpitaux situés dans 17 villes canadiennes, de Victoria à Saint John's.

Le Dr Sadovnick et le Dr George Ebers, autrefois de l'Université Western Ontario et aujourd'hui professeur à Oxford, en Angleterre, dirigent conjointement l'étude coopérative canadienne sur la prédisposition génétique.

La Fondation pour la recherche scientifique sur la sclérose en plaques et la Société canadienne de la sclérose en plaques financent les projets de recherche dont j'ai parlé et dans lesquels sont investis plusieurs millions de dollars.

(1340)

Le Canada joue un rôle de premier plan dans la recherche permettant de mener le combat contre cette terrible maladie. Je suis certain que c'est avec enthousiasme que vous achèterez les œillets que l'on vous offrira ou que vous ferez un don quand on sonnera à votre porte.

[Français]

LA CONFÉRENCE MINISTÉRIELLE DE LA FRANCOPHONIE

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool : Honorables sénateurs, j'aimerais aujourd'hui attirer votre attention sur la Conférence ministérielle de la Francophonie, qui s'est tenue cette dernière fin de semaine à St-Boniface, au Manitoba. Cette conférence ministérielle, la 19e depuis 1971, était organisée par l'Organisation internationale de la Francophonie. Le thème de la conférence était la prévention des conflits et la sécurité humaine.

Les conférences ministérielles de l'Organisation internationale de la Francophonie ont lieu entre chacun des Sommets de la Francophonie. Ces conférences ont normalement pour but de faire le suivi des décisions prises au dernier sommet, et de préparer le sommet suivant. Le prochain sommet, honorables sénateurs, aura lieu en septembre à Bucarest, en Roumanie.

La conférence de St-Boniface était placée sous l'égide du secrétaire général de l'OIF, l'ancien président sénégalais Abdou Diouf, que plusieurs d'entre nous connaissons et respectons profondément pour son immense sagesse et sa grande humanité.

La conférence de St-Boniface regroupait les ministres des Affaires étrangères de plus d'une vingtaine de pays membres de la Francophonie, dont le Canada. La conférence visait deux grands objectifs :

  • Une participation accrue et plus efficace de l'OIF dans les initiatives internationales de maintien de la paix, notamment par la prestation de formation et d'assistance technique; et
  • Un partenariat plus serré entre l'OIF et d'autres organes internationaux tels l'Organisation des Nations Unies.

Honorables sénateurs, comme je vous le répète souvent, la Francophonie est une réalité internationale. Elle a son importance et son utilité. La conférence de St-Boniface est un rappel ponctuel du rôle clé que joue cette Francophonie sur notre planète et la place du Canada dans cette Francophonie.

[Traduction]

LE RAPPORT DE LA VÉRIFICATRICE GÉNÉRALE SUR LE REGISTRE DES ARMES À FEU

L'honorable David Tkachuk : Honorables sénateurs, le rapport de mai 2006 de la vérificatrice générale nous apprend que l'ancien gouvernement avait gravement induit en erreur le Parlement. Honorables sénateurs, vous vous souviendrez que, en 2002, les dossiers du Centre des armes à feu Canada constituaient un tel fouillis que Sheila Fraser avait dû abandonner sa vérification.

Même si on a fait des progrès depuis 2002, il subsiste ce que la vérificatrice générale qualifie de « difficultés majeures », y compris l'existence de problèmes de longue date concernant la base de données d'enregistrement des armes d'épaule. Cela veut dire que les responsables du Centre des armes à feu Canada ne savent pas du tout combien de leurs dossiers d'armes à feu sont exacts ou incomplets.

La nouvelle équipe améliorée de gestion du Centre des armes à feu Canada a trébuché dans la mise en état de son nouveau système d'informatique. Le centre devait coûter 32 millions de dollars. Or, les coûts ont grimpé en flèche à 90 millions de dollars et le système n'est toujours pas prêt à fonctionner. On a menti aux Canadiens au sujet des résultats des coûts antérieurs et prévus du registre des armes d'épaule.

Permettez-moi de citer la vérificatrice générale :

Le contrôle du Parlement sur les fonds publics repose sur son vote des crédits annuels destinés à financer le ministère, car le vote indique que le Parlement approuve les plans de dépense de ces derniers. La communication, par les ministères, de l'information exacte de leurs dépenses au regard de leurs crédits annuels constitue donc la pierre angulaire du contrôle parlementaire.

À titre de parlementaires, nous nous fions à l'information que nous fournit le gouvernement lorsque nous votons les crédits, et lorsque nous tentons d'obliger le gouvernement à rendre des comptes. On nous dit maintenant que les rapports de rendement du Centre des armes à feu Canada ont induit le Parlement en erreur au sujet des résultats des activités de délivrance des permis et d'enregistrement. On nous dit que les responsables du centre n'ont pas tenu compte des règles du gouvernement en matière de passation de marchés et qu'ils n'ont pas davantage tenu compte des règles du Conseil du Trésor qui exigent une tenue de dossiers adéquate concernant les réunions où des décisions sont prises. On nous dit que, au lieu de faire état de leurs dépenses, ils les ont camouflées. Nous apprenons que le gouvernement précédent, dont les conseillers juridiques avaient estimé dès le début de 2004 que le registre aurait besoin d'obtenir un pouvoir de dépenser additionnel avant la fin de l'exercice financier, par le truchement d'un Budget supplémentaire des dépenses, a choisi de dépenser 22 millions de dollars dans l'illégalité.

Les honorables sénateurs se souviendront que, en janvier 2004, un nouveau premier ministre libéral s'efforçait de donner l'impression qu'il maîtrisait les coûts du registre des armes à feu. Il semble que ce n'était pas le cas.

On nous avait dit à l'origine que ce programme ne coûterait que 2 millions de dollars. Or, il a déjà coûté un milliard de dollars et la dépense continue.

(1345)

Si le Parlement avait su en 1995 qu'il en coûterait un milliard de dollars pour créer le registre des armes à feu, un débat éclairé aurait peut-être eu lieu pour déterminer s'il valait mieux investir cet argent dans les services de police. Le fait est que le système d'enregistrement des armes à feu tel qu'il existe actuellement ne fonctionne pas et que le gouvernement précédent n'a rien pu faire pour y remédier.

J'accueille avec enthousiasme l'annonce faite par le ministre de la Sécurité publique cet après-midi, selon laquelle les dépenses seront réduites et les millions de dollars ainsi économisés serviront à combattre la criminalité. J'applaudis également aux nombreux autres changements, aussi nécessaires qu'urgents, qui seront apportés au registre lui-même, ainsi qu'à l'amnistie qui sera offerte pendant un an à ceux qui n'ont pas encore enregistré leurs armes d'usage non restreint et à l'annulation des frais, cette année, pour ceux qui les ont déjà enregistrées.

[Français]

LA VISITE DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE LA FRANCOPHONIE

L'honorable Lise Bacon : Honorables sénateurs, mercredi dernier le secrétaire général de la Francophonie, M. Abdou Diouf, est arrivé au Canada afin d'entreprendre une visite officielle. Le point culminant de cette visite était la Conférence ministérielle de la Francophonie sur la prévention des conflits et la sécurité humaine.

M. Diouf est venu à l'invitation du Canada et pourtant, cela est tout à fait inusité, aucun représentant du gouvernement canadien n'était présent à l'aéroport pour l'accueillir. Pire encore, pour ajouter l'insulte à l'injure, M. Diouf, en dépit de son passeport diplomatique, a été l'objet d'une fouille à son arrivée au pays. C'est désolant de constater que le gouvernement conservateur n'est nullement sensible à la visite d'un dignitaire d'un calibre aussi élevé que le secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie. Mais cela ne m'a pas surprise du tout, car ce gouvernement, en traitant M. Diouf de la sorte, n'a fait que demeurer fidèle à lui-même, c'est-à-dire indifférent à la francophonie canadienne.

En effet, nulle part dans les priorités du gouvernement conservateur ne trouve-t-on la protection des francophones hors Québec et l'épanouissement de la langue française en milieu minoritaire. Sans compter que, en ce qui concerne la francophonie québécoise, très attachée au rayonnement de la langue, nous ne pouvons que constater l'absence tragique de sensibilité culturelle de ce gouvernement, apôtre de la loi et l'ordre mais ô combien indifférent à la culture.

Ce n'est pas moi qui l'affirme aujourd'hui pour marquer des points politiques. Ce n'est même pas nécessaire, car la ministre du Patrimoine canadien, Bev Oda, l'a fort bien énoncé, si on se fie à Mario Cloutier dans le quotidien La Presse du 11 mai dernier. Selon la ministre du Patrimoine elle-même: « Les Canadiens se soucient peu de culture. »

Voilà qui nous rassure sur les intentions de ce gouvernement. Ce ne sont pas les Canadiens qui se soucient peu de la culture, c'est plutôt ce gouvernement, avec sa ministre responsable en tête. Entre son silence complet sur la Francophonie, sa tiédeur sur le bilinguisme et son incompréhension renversante du rôle stratégique de la culture au Canada, ce gouvernement ne cesse de nous décevoir.

Quel contraste avec l'époque où j'étais vice-première ministre au Québec et où M. Diouf, déjà un homme d'État remarquable et digne, m'avait accueillie au Sénégal avec tous les honneurs et le savoir-faire de son corps diplomatique!

LE DROIT DES FEMMES À L'AVORTEMENT

L'honorable Lucie Pépin : Honorables sénateurs, hier, en réponse à ma question sur l'interruption de grossesse, madame le leader du gouvernement au Sénat a fait l'affirmation suivante :

[Traduction]

Les seuls projets de loi d'initiative parlementaire qui aient jamais été déposés à l'autre endroit, du moins au cours de la dernière législature, l'ont été par des députés libéraux.

[Français]

Je me permets d'apporter quelques précisions. Après quelques heures de recherche dans les hansards de la Chambre des communes, il apparaît qu'aucun projet de loi sur l'interruption de grossesse n'a été déposé par un député libéral lors de la dernière législature. Toutefois, le député conservateur Garry Breitkreuz a déposé deux motions en ce sens lors de la 38e législature. Au cours de la même législature, un autre collègue conservateur, M. Maurice Vellacott, a déposé, le 3 décembre 2004, le projet de loi C-307, visant à restreindre le droit des femmes à l'avortement.

Je reconnais, honorables sénateurs, et je sais que madame le leader du gouvernement est pro-choix. J'espère sincèrement pouvoir compter sur elle et sur son leadership pour convaincre les collègues de son caucus que les femmes qui choisissent l'interruption de grossesse ne le font pas par plaisir, mais par nécessité. Je me charge de convaincre les dissidents de mon propre parti à cet égard. C'est en joignant nos forces que nous pourrons garder ce dossier fermé à jamais.

(1350)

[Traduction]

LA JOURNÉE MONDIALE DE LUTTE CONTRE L'HOMOPHOBIE

L'honorable Nancy Ruth : Honorables sénateurs, aujourd'hui 17 mai, au Canada, c'est la Journée nationale de lutte contre l'homophobie. La Fondation Émergence, organisme québécois qui se consacre à la lutte contre l'homophobie, souligne cette journée depuis trois ans. Aujourd'hui marque aussi la deuxième Journée mondiale de lutte contre l'homophobie, qui se tient exactement 16 ans après que l'Organisation mondiale de la santé ait retiré l'homosexualité de sa liste de maladies mentales. Cette année, 50 pays soulignent la Journée mondiale de lutte contre l'homophobie. Elle a reçu l'aval du Parlement européen, qui l'a incluse dans sa résolution du 18 janvier condamnant l'homophobie, de même que celui du Parlement belge.

L'homophobie est une forme de discrimination fondée sur l'orientation sexuelle qui vise les lesbiennes, les gays, les bisexuels et les transgenres. Comme beaucoup d'autres formes de discrimination, l'homophobie découle de la peur et de l'ignorance liées à la croyance en des mythes persistants qui donnent lieu à des attitudes et à des comportements négatifs. Cette discrimination peut être violente, comme nous l'avons vu dans le cas d'Aaron Webster qui, en 2001, a été battu à mort dans le parc Stanley à Vancouver. Il est alarmant que des incidents de la sorte se produisent dans la société. Certaines formes de discrimination déguisée persistent dans nos maisons, dans nos collectivités, dans nos écoles et dans nos milieux de travail. Cela se traduit par des occasions d'emploi perdues, l'exclusion sociale et professionnelle subtile, le harcèlement ouvert et l'intimidation des enfants.

Le fait de célébrer une journée de lutte contre l'homophobie contribue à promouvoir les relations entre les personnes de tous les milieux et à favoriser une meilleure inclusion des gays, lesbiennes, bisexuels et transgenres dans la société.

Honorables sénateurs, je vous demande de reconnaître, comme moi, l'importance de cette journée, car le Canada ne veut pas promouvoir la discrimination. J'encourage tous les honorables sénateurs à poursuivre la lutte contre toutes les formes de discrimination.

VISITEURS À LA TRIBUNE

Son Honneur le Président : J'attire l'attention des sénateurs sur la présence à la tribune de Mme Margaret Healy, présidente de la United Irish Society of Montreal; de Mme Elizabeth Quinn, vice- présidente de la United Irish Society of Montreal; de Mme Courtney Elizabeth Mullin, reine du défilé de la Saint-Patrick de Montréal; de Mme Catherine Conway, princesse de la parade de la Saint-Patrick de Montréal; et de Mme Tara Lee Duffy, princesse du défilé de la Saint-Patrick de Montréal.

Ces dames sont des invitées de l'honorable sénateur Raymond Lavigne. Au nom de tous les sénateurs, je leur souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.


AFFAIRES COURANTES

PROJET DE LOI INSTITUANT LA SEMAINE NATIONALE DU DON DE SANG

PREMIÈRE LECTURE

L'honorable Terry M. Mercer présente le projet de loi S-214, Loi instituant la Semaine nationale du don de sang.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons- nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Mercer, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

(1355)

LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

PROJET DE LOI MODIFICATIF—PREMIÈRE LECTURE

L'honorable Jack Austin présente le projet de loi S-215, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu afin d'accorder des allégements fiscaux.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons- nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Austin, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)


[Français]

PÉRIODE DES QUESTIONS

LA DÉFENSE NATIONALE

L'AFGHANISTAN—LE PROLONGEMENT DE LA MISSION—LE DÉBAT À LA CHAMBRE DES COMMUNES

L'honorable Roméo Antonius Dallaire : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement. Le sénateur Munson m'a informé qu'aujourd'hui était une journée particulière dans l'histoire militaire de notre pays depuis la Seconde Guerre mondiale — une femme soldat en opération vient d'être tuée en Afghanistan.

[Traduction]

La question que j'adresse au leader concerne le débat précipité, d'à peine six heures, que tiendra l'autre endroit au sujet d'une motion présentée par le gouvernement sur la durée de notre engagement dans le cadre de la mission humanitaire que mènent actuellement les diplomates, les travailleurs humanitaires et les soldats canadiens dans la démocratie naissante de l'Afghanistan.

Pourquoi le premier ministre s'en remet-il à l'autre endroit pour prendre une décision aussi difficile et complexe qui revient à l'exécutif? Cela n'est pas conforme à la tradition de nos institutions parlementaires, d'autant plus que nous savons que ceux qui siègent là-bas ne disposent pas de l'information nécessaire pour prendre une décision globale et complète dans un dossier si complexe et sérieux. De plus, le premier ministre ne sera pas tenu de respecter cette décision en fin de compte. Le premier ministre veut-il établir un Cabinet par procuration où l'autre Chambre participerait aux décisions du pouvoir exécutif dans notre système parlementaire?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Je remercie l'honorable sénateur Dallaire de cette question.

La décision du premier ministre et du gouvernement de débattre cette question est explicite, à mon avis. À la demande de l'opposition, plus précisément du NPD, le premier ministre s'est engagé à tenir un débat parlementaire et un vote sur toute nouvelle mission. Comme l'a déclaré le chef de l'opposition après la réunion du caucus de l'opposition aujourd'hui, l'opposition officielle écoutera le débat de six heures et décidera ensuite comment ses députés voteront. Il est vrai que dans le passé, les gouvernements n'ont jamais consulté aucune des Chambres sur des missions importantes comme celle de l'Afghanistan, mais l'actuel premier ministre est déterminé à s'engager dans cette voie.

Les leaders parlementaires de tous les partis d'opposition ont été consultés au sujet de cette procédure. Ils ont accepté ce processus et ils ont accepté de voter, mais c'était hier et aujourd'hui est une autre journée.

(1400)

Le sénateur Dallaire : Honorables sénateurs, il faut noter que, sous sa forme actuelle, la motion ne peut être amendée. Elle porte précisément sur la durée de la mission et donne l'impression que toute personne qui n'approuve pas la durée de la mission ne souscrit pas à la mission elle-même.

Dans le cadre de ce débat, le premier ministre a créé un climat d'incertitude au sujet de notre engagement politique à l'égard de cette mission et des troupes qui ont été déployées et qui ont déjà subi des pertes. Nos alliés en Afghanistan ont déjà pris la décision d'engager leurs forces. À la suite de cette incertitude politique quant à la portée de notre engagement, nos troupes pourraient être davantage ciblées que celles de nos alliés.

Le premier ministre comprend-il qu'il pourrait, en définitive, être tenu responsable des dangers supplémentaires qu'il fait peut-être courir à nos troupes avec ce processus tout à fait artificiel de prise de décision à l'autre endroit?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, j'aime à penser que nous sommes bien décidés à être présents en Afghanistan. J'espère qu'il n'y a pas d'incertitude politique à ce sujet, malgré ce que certains députés néo-démocrates et certains médias peuvent affirmer.

Le gouvernement de l'Afghanistan et nos 35 alliés présents en Afghanistan comptent sur le Canada pour prolonger notre mission de deux ans, de février 2007 à février 2009. Comme beaucoup de politiciens de l'opposition l'ont déclaré, et comme mon honorable collègue le sait en raison de son expérience passée, il faut du temps pour se préparer à ces missions. Ainsi, il est important de prendre rapidement une décision à cet égard.

La prolongation de la mission sera un engagement important qui exigera peut-être que nous reprenions le commandement de la mission des Nations Unies en 2008, même si l'OTAN ne nous a pas encore demandé de le faire.

Le débat et le vote sur cette question sont justifiés à ce stade-ci. L'engagement de deux ans cadre avec la planification de nos principaux alliés. Le Royaume-Uni et les Pays-Bas vont déployer des équipes de reconstruction provinciales et des groupements tactiques dans le sud de l'Afghanistan d'ici à l'été 2006. Les Britanniques déploieront des troupes pendant une période pouvant aller jusqu'à trois ans et les Néerlandais le feront pendant deux ans.

La prolongation de la mission s'inscrit dans le cadre de nos engagements à l'égard de nos alliés de l'OTAN en ce qui concerne la situation en Afghanistan qui, de toute évidence, commence à s'améliorer non seulement sur le plan du respect des droits de la personne, plus particulièrement des femmes et des enfants, mais également pour les Afghans qui essaient de rebâtir et de mener leur vie quotidienne librement, sans crainte.

Le sénateur Dallaire : Honorables sénateurs, si le gouvernement est aussi déterminé et aussi inébranlable dans son engagement, pourquoi recourt-il à ce processus précipité dont le résultat ne lie aucunement le premier ministre et son Cabinet?

S'il souhaite que la Chambre des communes et possiblement le Sénat participent à la prise de décision gouvernementale, le gouvernement pourrait envisager de créer un comité mixte qui se pencherait sur des questions complexes comme celle-ci. Un tel comité aurait les ressources nécessaires et le temps voulu pour prendre les décisions responsables qui touchent la vie des Canadiens qui servent notre pays à l'étranger.

(1405)

Le sénateur LeBreton : Le premier ministre et le gouvernement ne se dérobent pas à leur pouvoir décisionnel. Nous répondons à un engagement que le Canada a pris antérieurement. En réponse aux demandes de l'opposition, le gouvernement consulte les députés élus afin de connaître leurs points de vue à l'égard de ces graves décisions.

Selon moi, c'est précisément ce que les Canadiens veulent. Ils veulent savoir exactement ce que pensent les parlementaires de ces décisions et ils comprennent parfaitement que le gouvernement a le droit de trancher.

Dans une société ouverte et libre, le type de société que nous essayons de créer en Afghanistan, c'est faire preuve de prudence et de respect que de tâter le pouls des parlementaires sur les enjeux importants. Selon moi, c'est bon signe et il n'y a rien à craindre.

L'honorable Joseph A. Day : Madame le leader du gouvernement pourrait-elle dire au Sénat si le premier ministre et le Cabinet qu'il dirige seront liés par le résultat du vote sur cette question, qui aura lieu à l'autre endroit?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je vais répondre à cette question avec optimisme. Je devine que la question fera l'objet d'un débat intéressant. Au bout du compte, je ne peux imaginer qu'une majorité de parlementaires canadiens puissent rejeter une motion ayant été débattue librement sur une mission importante dans une région où le Canada apporte une véritable contribution.

Le sénateur Day : Je n'ai pas obtenu de réponse.

L'AGRICULTURE ET L'AGROALIMENTAIRE

LE SECTEUR DES CÉRÉALES ET DES OLÉAGINEUX—L'ACCESSIBILITÉ DES FONDS DE SOUTIEN

L'honorable Daniel Hays (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Elle porte sur l'agriculture et elle est motivée par la grande détresse qui accable ce secteur au Canada, en particulier celui des céréales et des oléagineux.

Le budget renferme un montant de 755 millions de dollars qui avait été engagé par le gouvernement précédent aux fins du Programme des céréales et des graines oléagineuses, un montant additionnel de 500 millions de dollars qui faisait partie du programme électoral des conservateurs, plus un autre montant de 1 milliard de dollars pour 2006-2007 en guise de réponse à la crise. Cet argent ne suffit pas.

Plus important encore, même si le montant de 755 millions de dollars est versé actuellement, celui de 1,5 milliard de dollars ne l'est pas. Le ministre de l'Agriculture a déclaré qu'il ne voulait pas distribuer ces fonds de façon ponctuelle.

Voici ma question : quand ces fonds seront-ils mis à la disposition des agriculteurs canadiens qui traversent une crise?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Je remercie l'honorable sénateur de sa question.

Je crois savoir que le ministre de l'Agriculture se penche sur ce dossier en ce moment même. Je répondrai au sénateur de façon plus précise le plus tôt possible.

Le sénateur Hays : Le ministre a déclaré clairement qu'il ne voulait pas verser ces fonds dans le cadre d'un programme ponctuel.

Je me permets de rappeler au leader et aux sénateurs les paroles prononcées par celui qui était à l'époque chef de l'opposition, Stephen Harper, au cours d'un débat d'urgence sur l'agriculture, tenu le 3 février de l'an dernier. Il avait dit :

En plus des problèmes que nous connaissons déjà, nous verrons d'autres problèmes surgir à mesure que la saison des semences approche. Il faut régler le problème dès maintenant.

Compte tenu de la différence entre la position énoncée par le ministre de l'Agriculture et celle que défendait le premier ministre à l'époque où il était dans l'opposition, dois-je conclure qu'ils ne s'entendent pas sur la méthode à suivre?

(1410)

Le sénateur LeBreton : Je remercie l'honorable sénateur de sa question.

Comme je l'ai indiqué dans une réponse précédente, le budget 2006 reflète notre engagement à l'égard des agriculteurs, notamment avec l'annonce d'un financement additionnel de 2 milliards de dollars sur deux ans au titre de l'agriculture. Le budget 2006 prévoit 1,5 milliard de dollars de plus pour l'exercice 2006-2007. Ce montant comprend 500 millions de dollars pour des programmes de soutien agricole et un investissement unique de 1 milliard de dollars pour aider les agriculteurs à traverser la période de transition vers un programme plus efficace de stabilisation du revenu agricole et de secours en cas de catastrophe. Le budget prévoit également le versement de 200 millions de dollars pour aider les producteurs de poulet à prévenir et à combattre la grippe aviaire. En outre, comme je l'ai indiqué précédemment, les agriculteurs recevront un paiement accéléré de 755 millions de dollars dans le cadre du Programme de paiements pour les producteurs de céréales et d'oléagineux, une des premières promesses de notre gouvernement.

Pour ce qui est des autres paiements, comme je l'ai mentionné dans la réponse précédente, je m'engage à fournir une réponse immédiate.

LA CRISE DU REVENU AGRICOLE ET LE SECOURS EN CAS DE CATASTROPHE

L'honorable Daniel Hays (leader de l'opposition) : J'apprécie l'énumération que vient de faire la ministre; j'avais déjà souligné de façon positive certaines des initiatives mentionnées.

Le gouvernement reconnaîtra-t-il maintenant que l'agriculture est l'une des grandes priorités sur lesquelles doit se concentrer le budget, même s'il ne s'attarde pas beaucoup à l'agriculture puisqu'il n'en est question que sur une demi-page? Il est trop tard maintenant pour en parler dans le discours du Trône.

Madame le ministre aura-t-elle l'obligeance d'informer le gouvernement que les sénateurs, de ce côté-ci, se demandent pourquoi les difficultés du secteur agricole canadien ne sont pas considérées comme prioritaires et qu'ils exigent qu'elles le soient?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : L'agriculture constitue certainement une des grandes préoccupations du gouvernement. Je m'empresse de souligner que le gouvernement est au pouvoir depuis 101 jours. La situation à laquelle sont actuellement confrontés les agriculteurs canadiens n'est pas apparue le 23 janvier dernier. Le ministre de l'Agriculture, Chuck Strahl, collabore de façon diligente avec ses homologues provinciaux et avec les dirigeants du secteur agricole. Il a fait plusieurs annonces à Calgary, il y a une semaine, et il s'emploie sérieusement à résoudre le problème.

Je vais demander au ministre de l'Agriculture de me fournir le calendrier des paiements à venir.

LE COMMERCE INTERNATIONAL

L'ACCORD SUR LE BOIS D'OEUVRE—L'AIDE AUX ENTREPRISES ET AUX TRAVAILLEURS DE LA FORÊT

L'honorable Pierrette Ringuette : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Comme on peut le lire à la page 20 de son programme électoral, le Parti conservateur a promis qu'il :

Offrira une aide véritable aux entreprises et aux travailleurs canadiens qui subissent les conséquences des mesures commerciales illégales des Américains. [...] Nous allons continuer à aider à payer les frais de justice des entreprises canadiennes qui se battent contre les droits imposés par les Américains sur le bois d'œuvre. Nous allons soutenir les travailleurs forestiers déplacés.

S'engagera à investir un milliard de dollars sur cinq ans pour soutenir l'industrie canadienne du bois d'œuvre...

Jusqu'à maintenant, après 100 jours au pouvoir, le gouvernement a renié toutes ces promesses. Comment le gouvernement entend-il honorer certains de ces engagements puisqu'il a imposé un accord au Canada, se privant de la possibilité d'aider l'industrie et ses travailleurs?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Je remercie l'honorable sénateur de sa question.

Comme madame le sénateur Ringuette l'a dit lorsque je répondais à des questions, il y a environ une semaine, au moins je sais lire. Et j'ai notre programme électoral sous les yeux.

(1415)

L'accord sur le bois d'œuvre a été très bien accueilli parce que nous avons enfin mis en place un mécanisme pour régler ce problème commercial qui accaparait l'industrie, les gouvernements et les politiciens de part et d'autre de la frontière.

Comme l'honorable sénateur l'a signalé, nous ne sommes au pouvoir que depuis 101 jours. Le ministre Emerson a dit clairement que cet accord protège les politiques provinciales de gestion des forêts qui sont visées depuis des années par les procédures des Américains. L'accord offre un cadre qui assurera un climat de certitude et la stabilité. Il donne l'assurance que nos politiques seront protégées à l'avenir.

Des textes sur les dispositions empêchant de circonvenir l'accord seront rédigés avec soin au cours des prochains mois.

L'ACCORD SUR LE BOIS D'OEUVRE—DEMANDE DE DÉPÔT

L'honorable Pierrette Ringuette : Le gouvernement conservateur peut essayer de bâillonner son caucus, mais au bout du compte, il reste qu'il ne tient pas ses engagements. Il essaie de cacher aux Canadiens en quoi consiste réellement l'accord sur le bois d'œuvre.

C'est la troisième fois que je pose la question. Madame le leader du gouvernement va-t-elle déposer au Sénat ce projet d'accord sur le bois d'œuvre, rompant avec cette culture du secret, et renverra-t-elle ce document pour une étude approfondie au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je ne pense pas que quiconque nous a observés, moi ou la plupart des membres de notre caucus, puisse songer un instant à dire que nous sommes bâillonnés. C'est tout le contraire.

Quoi qu'il en soit, je vais prendre note de la question de l'honorable sénateur.

L'AGENCE DE PROMOTION ÉCONOMIQUE DU CANADA ATLANTIQUE

L'ÎLE-DU-PRINCE-ÉDOUARD—LES CONCOURS VISANT À COMBLER DES POSTES AU BUREAU RÉGIONAL

L'honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

La Commission de la fonction publique a affiché récemment un avis de concours public pour combler un poste de sous-ministre adjoint principal à l'Agence de promotion économique du Canada atlantique. Il s'agit du poste de vice-président du bureau régional de l'Île-du-Prince-Édouard.

Les fonctionnaires fédéraux de la province redoutent fort que l'avis de concours pour ce poste, qui est assorti d'un traitement de 115 000 $ à 135 000 $ par année, n'ait été conçu par le ministre à temps partiel de l'APECA, Peter MacKay, pour favoriser un travailleur politique conservateur de l'Île-du-Prince-Édouard.

Madame le leader du gouvernement peut-elle prendre l'engagement devant le Sénat que le premier ministre Harper veillera à ce que le ministre chargé de l'APECA ne fasse pas d'ingérence et que la procédure normale suive son cours pour combler ce poste?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, cette question est posée le lendemain du jour où nous avons essayé de mettre en place une commission des nominations qui surveillerait le processus de nomination pour qu'il soit transparent, juste et ouvert au public.

Le ministre MacKay est le ministre chargé de l'Île-du-Prince- Édouard. Au cours d'une législature passée, le ministre Don Jamieson, de Terre-Neuve-et-Labrador, a joué le même rôle. Il est souvent arrivé que des ministres d'autres provinces soient chargés de l'Île-du-Prince-Édouard.

Il est arrivé bien souvent que le gouvernement ne compte aucun représentant de l'Île-du-Prince-Édouard et qu'il doive en confier la responsabilité politique à un membre du gouvernement originaire d'une autre province.

Je peux dire fort simplement que quiconque sera engagé pour occuper ce poste important à l'APECA sera assurément très compétent et s'acquittera fort bien de ses responsabilités.

Le sénateur Cordy : Honorables sénateurs, chose curieuse, seul l'anglais est exigé du titulaire du poste de vice-président de l'APECA alors qu'un autre poste affiché récemment, toujours pour l'APECA à l'Île-du-Prince-Édouard, un poste qui relèvera du vice-président, exigera la maîtrise des deux langues officiales. Pourquoi y a-t-il une différence entre les deux avis de concours? L'APECA ne devrait pas être l'Agence pour l'emploi de conservateurs avertis.

La description du poste de vice-président a-t-elle été spécialement conçue pour garantir le poste à un ami du ministre?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, c'est très intéressant. Les sénateurs vont se fatiguer de m'entendre dire que nous ne sommes au pouvoir que depuis 101 jours. Je doute fort qu'un membre de notre gouvernement soit assez bête pour dire à la Commission de la fonction publique comment elle doit faire son travail.

L'honorable Joan Fraser (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, madame le leader du gouvernement au Sénat vérifiera-t-elle aussi pour nous, pendant qu'elle y sera, si cet avis sur un poste où seul l'anglais est obligatoire a été publié à l'Île- du-Prince-Édouard dans des médias des deux langues officielles, comme la loi l'exige?

(1420)

Le sénateur LeBreton : Je vais me renseigner pour l'honorable sénateur. La Commission de la fonction publique est évidemment responsable de l'embauche dans la fonction publique. Je suis curieuse d'entendre ce qu'elle aura à dire en réponse à cette question parce que je ne suis pas au courant moi-même.

LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

LE CENTRE CANADIEN DES ARMES À FEU—L'ABOLITION DU REGISTRE DES ARMES D'ÉPAULE

L'honorable Lorna Milne : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Après les meurtres de l'École Polytechnique, des lois plus sévères concernant les armes à feu ont été adoptées en 1991. En 1995, le Parlement a adopté une loi imposant à tous les propriétaires d'armes à feu d'obtenir un permis et d'enregistrer leurs armes. Par suite de ces mesures, le taux d'homicides commis au moyen de carabines et de fusils de chasse a baissé de 68 p. 100 entre 1991 et 2002. Récemment, le président de l'Association canadienne de la police professionnelle, Tony Cannavino, a déclaré que les armes à feu utilisées pour commettre des crimes ne consistent pas seulement en des armes de poing et qu'au moins six ou sept agents de police ont été tués à l'aide d'armes d'épaule.

Cela étant, je voudrais demander à madame le leader du gouvernement au Sénat si elle croit bien sage la décision du gouvernement de court-circuiter le processus démocratique et d'abolir le registre des armes d'épaule?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, quiconque achète une arme à feu doit obtenir un permis. Les médias et des gens qui devraient être plus avisés créent délibérément la confusion entre contrôle des armes à feu et confondent registre des armes d'épaule.

J'ai appris certaines choses en écoutant des émissions télévisées concernant des agents de police en patrouille qui doivent faire face à des armes illicites non enregistrées. On dit que le Centre reçoit 5 000 demandes de renseignements tous les jours. C'est bien le cas, mais le registre contient aussi les données sur les armes semi-automatiques et les armes de poing. Le fait qu'il y ait 5 000 demandes de renseignements par jour ne signifie pas nécessairement que les demandes produisent des résultats ou des réponses utiles. Beaucoup d'agents de police l'ont dit.

Le contrôle des armes à feu a force de loi au Canada. Nous parlons ici du registre des armes d'épaule. La vérificatrice générale nous a dit non seulement de quelle façon le Parlement a été délibérément trompé, mais aussi, ce qui est pire, que lorsque le Centre envoyait aux gens des avis les informant de la révocation de leur permis, 23 p. 100 des avis étaient retournés comme envois non livrables. Il est clair que le registre ne fonctionne pas. Quiconque a connu la victime d'un crime quelconque, mais particulièrement un crime commis à l'aide d'une arme à feu, rejettera toujours l'idée d'abroger les lois sévères de contrôle des armes à feu que nous avons déjà. Ces lois sont l'œuvre de gouvernements conservateurs, d'abord en 1934, puis en 1991.

Le sénateur Milne : Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire à poser au leader du gouvernement au Sénat. Si l'Association canadienne des chefs de police, l'Association canadienne de la police professionnelle, plus de 40 associations féminines, le Centre de prévention du suicide, la Société canadienne de pédiatrie et l'Association canadienne des médecins d'urgence conviennent tous qu'il vaut la peine d'appuyer le registre des armes à feu, pourquoi le gouvernement ne veut-il pas conserver l'un des éléments essentiels de ce programme? Aujourd'hui, le coût de l'enregistrement des armes à feu au Canada est d'environ 15,7 millions de dollars par an. Sur ce montant, le coût de l'enregistrement des carabines et des fusils de chasse s'élève à environ 10 millions de dollars.

(1425)

Madame le leader du gouvernement au Sénat croit-elle que 10 millions de dollars par an, c'est payer trop cher pour assurer la sécurité des agents de police du Canada? Est-ce que 10 millions de dollars constituent un fardeau financier trop lourd pour le gouvernement quand il s'agit de contribuer à la prévention des crimes commis à l'aide d'armes d'épaule au Canada?

Le sénateur LeBreton : Ces 10 millions de dollars seraient-ils cachés ou non? Voilà ma réponse. En fait, d'après l'Ottawa Sun d'aujourd'hui, l'ancien chef de la police d'Ottawa a déclaré que les libéraux lui avaient menti. La plupart des gens ordinaires lisent l'Ottawa Sun, et je ne suis qu'une femme ordinaire.

Le fait est que les criminels se servent d'armes illicites pour commettre la plupart des crimes que nous voyons dans nos rues. J'appuie certainement des lois sévères de contrôle des armes à feu qui protègent la vie de l'ensemble des hommes, des femmes et des enfants.

Le registre des armes d'épaule ne fonctionne pas et il a été très coûteux. Il reste encore un registre que la police peut consulter. Je n'ai pas l'impression qu'il soit nécessaire que le registre contienne le nom des agriculteurs. Mon père était agriculteur et avait un fusil, mais il n'aurait jamais envisagé de l'utiliser à des fins illicites. Je crois que le registre des armes d'épaule doit être aboli, mais nous devrions continuer à appuyer nos excellentes lois de contrôle des armes à feu.

LE CENTRE CANADIEN DES ARMES À FEU—L'ABOLITION DU REGISTRE DES ARMES D'ÉPAULE—LA DÉCLARATION DU MINISTRE

L'honorable Lowell Murray : Madame le ministre aurait-elle l'obligeance d'obtenir un exemplaire de la déclaration faite à ce sujet par le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile? Je n'ai pas vu la déclaration, mais j'ai vu des rapports de presse juste avant d'arriver. J'ai l'impression, après avoir écouté cet échange, que certaines des questions et — si je peux me permettre de le dire — certaines des réponses ne tenaient pas compte de cette déclaration. Madame le leader du gouvernement peut-elle obtenir un exemplaire de la déclaration et la déposer avant l'ajournement?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'obtiendrai un exemplaire de la déclaration. Je vais cependant donner un bref aperçu de ce que le ministre Stockwell Day a annoncé aujourd'hui.

Je n'ai pas le texte de la déclaration, mais je peux vous résumer les mesures immédiates que le ministre a annoncées. La première consiste à transférer la responsabilité du Centre canadien des armes à feu à la GRC et la deuxième, à réduire le budget de fonctionnement annuel du programme de 10 millions de dollars. Le ministre Stockwell Day a annoncé la mise en œuvre de la dispense et du remboursement des frais de renouvellement du permis ainsi que l'élimination de la vérification physique des armes d'épaule. Il a également annoncé une amnistie d'un an pour protéger de toutes poursuites les propriétaires d'armes à feu sans restriction qui étaient auparavant titulaires de permis, et pour les encourager à se conformer à la loi dans sa version actuelle.

Honorables sénateurs, le gouvernement libéral a eu dix ans pour établir ce registre, qui ne fonctionne toujours pas correctement. Pourquoi ne pas accorder aux citoyens ordinaires respectueux des lois une autre année? L'amnistie est un élément important des mesures annoncées.

[Français]

RÉPONSE DIFFÉRÉE À UNE QUESTION ORALE

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer une réponse différée à une question orale du sénateur Banks, posée le 6 avril 2006, concernant le financement des programmes environnementaux.

LES TRAVAUX PUBLICS ET LES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

LE FINANCEMENT DES PROGRAMMES ENVIRONNEMENTAUX

(Réponse à la question posée le 6 avril 2006 par l'honorable Tommy Banks.)

À titre de ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, je peux informer le sénateur que, depuis avril 2005, mon ministère mène et facilite, par l'entremise du Bureau de l'écologisation des opérations gouvernementales, la mise en oeuvre d'une approche pangouvernementale en matière d'écologisation des activités gouvernementales.

Nous collaborons très étroitement avec bon nombre de ministères. À l'occasion des réunions régulières de divers comités directeurs, nous faisons faire, de concert avec les ministères, des progrès importants et mesurables à l'amélioration du rendement environnemental du gouvernement. Pour ce faire, nous axons nos efforts sur des priorités telles que la réduction de la consommation énergétique dans les immeubles, l'amélioration de la gestion du parc automobile et les achats écologiques. Le suivi de ces progrès est assuré par de hauts fonctionnaires du Conseil du Trésor, d'Environnement Canada, et de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada.

Le gouvernement, sous la direction du ministre des Ressources naturelles, est à mettre en place un plan spécifiquement canadien qui vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre. De plus, on a déjà annoncé l'abolition progressive de certains programmes, notamment un programme de l'initiative Prêcher par l'exemple dont les travaux ont été menés à bien. Ce programme visait à offrir un financement unique pour la mise à l'essai de pratiques éconergétiques et de technologies renouvelables dans les installations du gouvernement du Canada. La majorité des programmes relatifs aux changements climatiques, y compris les autres programmes de l'initiative Prêcher par l'exemple, font l'objet d'un examen, et aucune décision n'a encore été prise au sujet du financement.


(1430)

ORDRE DU JOUR

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'AJOURNEMENT ET L'ADRESSE AU PARLEMENT DU PREMIER MINISTRE DE L'AUSTRALIE IMPRIMÉE EN ANNEXE—ADOPTION DE LA MOTION

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement), conformément à l'avis du 16 mai 2006, propose :

Que, à 14 h 30 le jeudi 18 mai 2006, si le Sénat n'a pas terminé ses travaux, le Président interrompe les délibérations pour ajourner le Sénat;

Que, si un vote est différé jusqu'à 17 h 30 le jeudi 18 mai 2006, le Président interrompe les délibérations à 14 h 30 et suspende la séance jusqu'à 17 h 30, heure de la tenue du vote différé;

Que l'adresse du Premier ministre de l'Australie, qui doit être prononcée dans l'enceinte de la Chambre des communes à 15 heures ce jour-là devant les sénateurs et les députés, de même que les présentations et les observations qui s'y rapportent, soient imprimées sous forme d'annexe des Débats du Sénat pour ladite journée et constituent partie intégrante des archives de cette Chambre;

Que, lorsque le Sénat s'ajournera le jeudi 18 mai 2006, il demeure ajourné jusqu'au mardi 30 mai 2006, à 14 heures.

(La motion est adoptée.)

LE SÉNAT

ADOPTION DE LA MOTION TENDANT À FÉLICITER SA MAJESTÉ LA REINE ELIZABETH II À L'OCCASION DE SON QUATRE- VINGTIÈME ANNIVERSAIRE

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement), conformément à l'avis du 16 mai 2006, propose :

Que le Sénat envoie une Adresse à Sa Majesté la reine Elizabeth II, lui transmettant les vœux chaleureux et félicitations sincères de tous les sénateurs à l'occasion de son quatre-vingtième anniversaire de naissance.

— Honorables sénateurs, je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que Sa Majesté est une dame remarquable. Elle est née le 21 avril 1926, fille du duc de York et futur roi Georges VI.

Lors de sa jeunesse durant la Seconde Guerre mondiale, la princesse Elizabeth faisait partie de l'armée britannique et est devenue un symbole de l'espoir. À l'âge de 21 ans, elle a proclamé qu'importe la durée de sa vie, elle serait dédiée au Commonwealth.

Sa Majesté a beaucoup de respect et d'admiration pour le Canada et son peuple et nous avons beaucoup de respect et d'admiration pour notre reine. C'est donc un très grand honneur pour moi, appuyé par le sénateur Fraser, de proposer cette motion soulignant l'anniversaire de Sa Majesté la reine Elizabeth II, reine du Canada.

[Traduction]

L'honorable Joan Fraser (leader adjoint de l'opposition) : Je joins ma voix à celle du sénateur Comeau.

Les honorables sénateurs connaissent sans doute l'expression « Votre Gracieuse Majesté ». Selon moi, ce qualificatif ne conviendrait à personne mieux qu'à la reine Elizabeth II. C'est en effet une femme d'une rare grâce, d'une rare élégance et d'un rare sens du devoir qui, pendant un règne long et remarquable, a montré une affection particulière pour le Canada. De ce côté-ci, nous sommes heureux d'appuyer la motion.

L'honorable Anne C. Cools : Honorables sénateurs, je m'associe aujourd'hui à mes collègues pour souhaiter un joyeux anniversaire à Sa Majesté, la reine Elizabeth II, la reine du Canada. La reine Elizabeth a eu 80 ans le 21 avril. Lundi prochain, le 22 mai, jour communément désigné comme la fête de la Reine, ou fête de Victoria, les Canadiens célébreront officiellement l'anniversaire de la reine. Lundi prochain correspond à la date qui a été désignée par proclamation royale comme jour officiel de célébration de l'anniversaire de la reine Elizabeth. Je vais lire cette proclamation aux fins du compte rendu. Elle a été publiée dans la Gazette du Canada, le 27 février 1957.

LA FÊTE DE LA REINE

Proclamation

VINCENT MASSEY

CANADA

ELIZABETH DEUX, par la Grâce de Dieu, REINE du Royaume-Uni, du Canada et de ses autres royaumes et territoires, Chef du Commonwealth, Défenseur de la Foi.

A tous ceux à qui les présentes parviendront ou qu'icelles pourront de quelque manière concerner,—salut :

PROCLAMATION

Vu le fait que Notre anniversaire de naissance tombe le vingt et unième jour d'avril, il est jugé à propos de désigner le premier lundi précédant immédiatement le vingt-cinquième jour de mai comme le jour où Notre anniversaire de naissance doit être officiellement célébré au Canada en 1957 et chaque année par la suite.

Sachez donc maintenant que Nous proclamons et déclarons par Notre présente proclamation que le premier lundi précédant immédiatement le vingt-cinquième jour de mai est par les présentes désigné pour la célébration au Canada de Notre anniversaire de naissance, en l'an de grâce mil neuf cent cinquante-sept et chaque année par la suite.

De ce qui précède, Nos féaux sujets et tous ceux que les présentes peuvent concerner sont par les présentes requis de prendre connaissance et d'agir en conséquence.

En foi de quoi, Nous avons fait émettre Nos présentes Lettres Patentes et à icelles fait apposer le Grand Sceau du Canada. Témoin : Notre très fidèle et bien-aimé Conseiller, Vincent Massey, membre de Notre Ordre des Compagnons d'honneur, Gouverneur général et Commandant en chef du Canada.

En Notre Hôtel du gouvernement, en Notre Cité d'Ottawa, ce trente et unième jour de janvier en l'an de grâce mil neuf cent cinquante-sept, le cinquième de Notre Règne.

Par ordre,

Le Sous-secrétaire d'État,

C. STEIN

DIEU SAUVE LA REINE

Les honorables sénateurs savent combien je suis affligée de constater l'érosion systématique de la monarchie au Canada et combien je suis fidèle à la famille royale en toutes circonstances. Mon dévouement envers Sa Majesté a commencé lorsqu'elle était encore une jeune femme et que j'étais enfant. Je me souviens comme si c'était hier de son couronnement en 1953. Sa Majesté a alors prêté serment, le serment du couronnement. Elle a juré fidélité à ses sujets et à Dieu et elle a juré de se montrer juste et clémente.

J'avais alors 9 ans et j'habitais à la Barbade, dans les Antilles britanniques. J'en étais à ma première année d'études au Queen's College, la plus ancienne école pour filles de l'Empire britannique. L'école se trouvait sur un terrain occupant plusieurs acres, avec des surfaces de jeu, notamment des terrains de hockey sur gazon et trois courts de tennis. Le Queen's College avait été nommé ainsi en l'honneur de la reine Victoria.

Pour souligner le couronnement de la reine Elizabeth II, mon école, le Queen's College organisa un spectacle en plein air dans lequel une élève de classe terminale monta à cheval en amazone pour interpréter le personnage de la reine Elizabeth Iere en train de haranguer ses troupes dans son discours enflammé avant la bataille de Tilbury, en 1588. Les troupes attendaient de pied ferme l'armada espagnole. La reine Elizabeth Iere leur avait alors déclaré :

Je n'ai peut-être que le corps fragile d'une femme, mais j'ai le cœur et l'âme d'un roi d'Angleterre et je m'en prendrais à quiconque oserait envahir mon royaume, qu'il soit de Parme et d'Espagne ou un autre prince d'Europe.

La reine Elizabeth Iere a montré à ses troupes que l'art du commandement est une affaire de cœur et d'âme et qu'il faut servir Dieu, la reine et son pays avec un cœur de lion.

Honorables sénateurs, ces paroles m'ont profondément influencée au cours de mon existence. L'une des maîtresses d'école qui m'ont enseigné à l'époque de ce spectacle célébrant le couronnement en 1953 a eu l'occasion d'assister en personne à la cérémonie du couronnement qui s'est déroulée le 2 juin 1953 à l'abbaye de Westminster, à Londres. Son récit de l'événement est encore bien vivant dans mon esprit. Cette maîtresse d'école se nommait Grace Adams et était mariée à une personnalité marquante de la scène politique à la Barbade, qui allait en être un jour le premier ministre. Cet homme est devenu plus tard sir Grantley Adams et mon ancienne maîtresse, lady Grace Adams.

Honorables sénateurs, mon enfance a été marquée par ses récits sur de grands hommes publics, la fonction publique et la responsabilité civique. Je me souviens aussi très bien que la même institutrice nous parlait des grands réformateurs sociaux de la Grande-Bretagne, des parlementaires comme William Wilberforce et lord Shaftesbury.

Honorables sénateurs, je suis une ardente partisane de Sa Majesté ainsi que de notre système de gouvernement, la monarchie constitutionnelle. Sa Majesté la reine détient le pouvoir d'actualisation selon notre Constitution. C'est elle qui dispose du pouvoir de promulgation de toutes nos lois. C'est la sanction royale de Sa Majesté qui donne force de loi aux projets de loi. Le siège du gouvernement à Ottawa est la résidence de la Gouverneure générale. Le Parlement du Canada se compose du Sénat, de la Chambre des communes et de la reine. Sa Majesté la reine constitue la caput, principium, et finis, c'est-à-dire la tête, le début et la fin du Parlement, d'où l'expression la reine en son Parlement.

Honorables sénateurs, j'ai cherché une citation qui témoigne de l'importance de la reine en son Parlement dans notre Constitution. Je voudrais attirer votre attention sur une déclaration de Benjamin Disraeli, le premier ministre du Royaume-Uni de la fin des années 1800. Dans son livre qui a paru en 1852, Lord George Bentinck : A Political Biography, il a décrit la portée et le sens réels du pouvoir de promulgation de la sanction royale par la reine. Il a écrit :

En tant que division parlementaire dont la décision est finale, et donc sollicitée en dernier, l'opinion du souverain demeure libre et non compromise jusqu'à ce que l'assentiment des deux Chambres ait été reçu. Ce veto du monarque anglais n'est pas non plus une formule vide. Il n'est pas difficile d'imaginer le cas où son exercice, appuyé par les sympathies d'un peuple loyal, pourrait défaire un cabinet anticonstitutionnel et un parlement corrompu.

Honorables sénateurs, je tente toujours de faire valoir que le pouvoir d'actualisation dans notre Constitution est exercé par Sa Majesté, et il est bien réel; ce n'est pas un vestige ni un ornement ni un truc cérémonial. Il est bien réel.

(1440)

Honorables sénateurs, j'aimerais souhaiter à Sa Majesté la reine Elizabeth, fille du roi George VI et de la reine Elizabeth, connue sous le nom de la reine-mère, un très joyeux anniversaire. J'aimerais également profiter de l'occasion pour lui souhaiter de célébrer encore de nombreux joyeux anniversaires.

Je remercie la reine, son époux et sa famille de leurs nombreuses décennies de dévouement, d'engagement et de services à l'égard de leurs sujets du Canada. J'aimerais également remercier la reine et sa famille du rôle de premier plan qu'ils ont joué au cours de la Seconde Guerre mondiale afin de soutenir les Britanniques et tous les sujets de l'Empire britannique qui ont assumé presque seuls le fardeau de la guerre pendant plusieurs années. Je l'en remercie du fond du coeur.

Honorables sénateurs, les Canadiens, jeunes et vieux, hommes et femmes, anciens combattants et autres, ont beaucoup d'affection pour la reine. Que Dieu la bénisse. Je souhaite qu'elle règne sur nous pendant très très longtemps et je tiens à dire qu'elle occupe une place bien spéciale dans mon coeur et dans ma tête, et qu'il en est probablement de même pour bon nombre de Canadiens.

Les honorables sénateurs qui en doutent auraient dû voir les gens rassemblés à Juno Beach il y a quelques années. Ils n'avaient d'yeux que pour Sa Majesté. Tous les yeux étaient tournés vers Sa Majesté la reine Elizabeth II en raison des liens qu'elle représente avec l'histoire, des liens qu'elle entretient depuis longtemps avec le Canada et du rôle que ses parents surtout, la reine-mère et le roi George VI, et elle ont joué pour venir en aide aux Canadiens pendant cette terrible période alors que les hommes et les femmes de notre pays participaient à la guerre.

Son Honneur le Président : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

LE FINANCEMENT POUR LE TRAITEMENT DE L'AUTISME

INTERPELLATION—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Munson, attirant l'attention du Sénat sur le financement pour le traitement de l'autisme. — (L'honorable sénateur Di Nino)

L'honorable Ione Christensen : Honorables sénateurs, je souhaite remercier le sénateur Munson d'avoir formulé l'interpellation à propos de l'autisme. L'incidence du trouble du spectre de l'autisme, sous toutes ses nombreuses formes, touche maintenant un enfant sur 166. Dans les années 1970, on le diagnostiquait rarement. Il est maintenant 10 fois plus fréquent qu'il y a seulement 20 ans.

Les défis sont nombreux. Qu'il s'agisse d'autisme, de l'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation fœtale, de la mucopolysaccharidose, dite MPS, du syndrome de Down, pour ne nommer que quelques maladies, on appelle souvent « anges parmi nous » les enfants dont les cerveaux et les corps sont ainsi atteints. Dans le passé, ils mouraient souvent très jeunes, mais leurs courtes vies laissaient toujours derrière elles une lumière brillante et inoubliable. Leur intellect, leur tendresse dans l'adversité, leur perception de ce qu'est vraiment la vie et leur capacité de laisser de petites choses les rendre heureux étaient des cadeaux qui aidaient les autres à grandir. Toutefois, tout cela avait un prix, un énorme prix pour l'enfant, pour ses parents et pour la société.

Grâce aux progrès de la recherche et de la médecine, ces anges vivent plus longtemps. Le coût financier de ce qui est fait pour les aider à être des membres productifs de la société dépasse cependant de beaucoup la capacité de payer de n'importe quelle famille, et le remboursement limité assuré par les régimes provinciaux d'assurance-maladie est très loin de suffire.

Aux États-Unis, le financement fédéral a plus que triplé ces 10 dernières années dans le cas de l'autisme. Il dépasse maintenant les 100 millions de dollars. Toutefois, en guise de comparaison, on a consacré 500 millions de dollars au traitement du cancer chez les enfants, qui touche beaucoup moins d'enfants.

Il y a des programmes efficaces, mais ils nécessitent une thérapie en tête à tête, dont le coût est exorbitant et qui n'est prise en charge par aucun type d'assurance-maladie. Les parents doivent littéralement hypothéquer leur vie pour répondre à ces besoins.

Pour ce qui est du syndrome de Maroteaux-Lamy, ou MPS, le coût du traitement de remplacement d'enzymes s'élève à 200 000 $ par année et il n'est pas remboursé par nos régimes d'assurance- maladie. La MPS est une forme très rare de déficience enzymatique. On n'en recense que 10 cas au Canada. Je connais personnellement deux des personnes atteintes — une au Yukon et l'autre en Ontario.

Le coût de l'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation fœtale dépasse les 344 millions de dollars par année. Le coût correspondant à chacune des personnes touchées par des troubles résultant de l'alcoolisation fœtale s'établit à 1 million de dollars sur la durée totale de leur vie. On dénombre chaque année au Canada 4 000 nouveaux cas de troubles causés par l'alcoolisation fœtale. Peut- on vraiment attendre plus longtemps pour agir?

Je crois que le sénateur Munson demandera au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie d'étudier les besoins financiers et la meilleure façon d'y répondre. Quoi de mieux qu'un comité sénatorial pour le faire? Cependant, nous devrions examiner toutes les afflictions qui débordent nos lignes directrices en matière de santé. Les besoins sont énormes.

Il faudrait créer un fonds spécial de santé pour répondre à ces besoins très particuliers, très lourds et extrêmement coûteux. Ce fonds pourrait avoir une portée nationale et les provinces et les territoires pourraient y puiser.

Outre les dépenses liées au traitement, il faudrait créer des chaires de recherche pour examiner la prévention — comme dans le cas de l'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation fœtale — ainsi que les causes et les remèdes dans les cas du trouble du spectre de l'autisme et de la mycolopysaccharidose. Avec la médecine moderne, ces enfants parviennent à l'âge adulte. Avec des soins et de l'attention, ils peuvent, pour la plupart, devenir fonctionnels et productifs dans la société. Cela sera très coûteux, mais à défaut de cette aide, ils deviendront des adultes non fonctionnels et seront pris en charge par des institutions, pénales et autres. Cela aussi est très coûteux — à mon avis, encore plus que de les aider dès le début.

Les gouvernements de toutes allégeances ont du mal à s'engager à appliquer des programmes à long terme, mais il s'agit là d'un secteur où le financement doit être soutenu pour être de quelque utilité que ce soit. Nous devons trouver des moyens de répondre aux besoins. Le fardeau que supporte un parent qui doit aider de tels enfants est énorme. La responsabilité d'aider ces anges incombe à toute la société et aux gouvernements que la société met en place pour la représenter.

L'honorable Madeleine Plamondon : Puis-je poser une question au sénateur?

Le sénateur Christensen : Certainement.

Le sénateur Plamondon : Qu'est-ce que madame le sénateur entend par « être productifs dans la société »? J'ai l'impression que, si nous voulons obtenir un financement, nous devons toujours utiliser l'expression à la mode : « productifs dans la société ».

Ce ne sont pas tous les Canadiens qui pourront être productifs, et ils auront toujours besoin de soins. Madame le sénateur pourrait- elle expliquer davantage ce qu'elle entend par « productifs »?

Le sénateur Christensen : Je remercie madame le sénateur de la question.

À défaut d'un traitement et d'une thérapie, tous ces enfants, lorsqu'ils atteindront l'âge adulte, deviendront un fardeau pour la société. Avec de l'aide et de l'attention, certains de ces enfants seront en mesure de bien fonctionner dans la société. Par exemple, il est possible de prévenir le syndrome d'alcoolisation fœtale, mais l'enfant qui en est atteint devient un fardeau pour la société et il aura besoin de soins continus toute sa vie durant. Si l'interpellation est renvoyée au comité pour y être étudiée plus à fond, on portera certainement une attention spéciale au financement de soins continus. Madame le sénateur a raison de dire qu'être un membre productif de la société n'est pas la fin des fins. Cependant, comme de nombreuses personnes doivent recevoir des soins continus, le programme doit aussi en tenir compte.

(Sur la motion du sénateur Di Nino, le débat est ajourné.)

(1450)

L'ENGAGEMENT DU CANADA ENVERS LE DARFOUR, AU SOUDAN

INTERPELLATION—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Dallaire, attirant l'attention du Sénat sur la situation dans la région du Darfour au Soudan et l'importance de l'engagement du Canada envers le peuple de ce pays ravagé par la guerre.—(L'honorable sénateur Nancy Ruth)

L'honorable Nancy Ruth : Honorables sénateurs, notre gouvernement est engagé à faire de son mieux pour ramener la paix au Soudan. Cet engagement est encore une priorité et une initiative stratégique importante pour le Canada. Pour mieux comprendre la situation, il est utile de dresser le tableau de cette région et de rappeler son historique et la situation actuelle.

Honorables sénateurs, le Soudan est le plus grand pays d'Afrique et se classe au sixième rang des pays les plus peuplés. Déchiré par la guerre depuis près d'un demi-siècle, ce pays est d'une grande instabilité. Pour ramener la paix en Afrique de l'Est, il faut venir à bout de cette instabilité qui règne partout au Soudan et dont les répercussions ne se limitent pas aux frontières nationales. Il faut s'attaquer à la situation au Soudan et la régler dans le contexte à la fois régional et continental. On ne peut espérer mettre un terme à la misère de la population du Darfour ni au viol dont sont victimes les femmes et les jeunes filles de la région sans tenir compte de la nécessité d'assurer la paix dans tout le Soudan. C'est ce que reflète l'approche adoptée par le Canada.

Honorables sénateurs, janvier dernier a marqué l'anniversaire de la signature de l'Accord de paix global, qui a mis un terme de façon efficace à la guerre civile ayant longtemps opposé le Nord et le Sud du pays. La guerre a fait un très grand nombre de victimes, fauchant environ deux millions de vies et chassant de chez eux plus de quatre millions d'habitants. Malgré l'accord de paix, les répercussions de la guerre continuent de se faire sentir et il faudra un effort massif et continu de la part des Soudanais et de la collectivité internationale pour mettre en place l'infrastructure nécessaire pour appuyer le développement durable dans la région et pour garantir qu'il n'y a pas de reprise des combats. Le Canada est fier d'avoir joué un rôle dans le processus de paix qui a mis un terme au conflit entre le Nord et le Sud du pays, et il continue de remplir ce rôle en participant à la force de maintien de la paix des Nations Unies, qui a été déployée pour surveiller le respect de l'accord.

À la récente réunion du Consortium Soudan, organisée sous les auspices de la Banque mondiale à Paris, le Canada a annoncé qu'il devançait l'échéancier et versait les 90 millions de dollars qu'il avait promis pour appuyer la consolidation de la paix au Soudan. Ce montant inclut 40 millions de dollars sur deux ans pour l'aide humanitaire; 10 millions de dollars pour les initiatives d'édification de la paix et de bonne gouvernance; et 40 millions de dollars pour appuyer l'entière mise en œuvre de l'Accord de paix global et pour réduire la pauvreté. Près du tiers du montant de 90 millions de dollars qui avait été promis est affecté précisément pour aider la population du Darfour.

Honorables sénateurs, les Nations Unies estiment que les violences au Darfour, dans l'ouest du Soudan, ont déplacé environ 2 millions de personnes et fait des dizaines de milliers de morts. Aujourd'hui, 200 000 réfugiés s'entassent dans des camps au Tchad, dans des conditions de plus en plus instables. Le Canada demeure profondément préoccupé par la poursuite de la violence et la culture persistante d'impunité au Darfour, et tout particulièrement par les attaques contre les civils. Les violences qui se poursuivent au Darfour contreviennent à l'accord de cessez- le-feu de 2004. Le Canada félicite les parties d'avoir signé l'Accord de paix sur le Darfour et il est réconforté par l'idée que la violence cessera et qu'un avenir pacifique s'annonce pour le peuple du Darfour. Je félicite les représentants canadiens sur le terrain, à Abuja, qui ont déployé des efforts intenses pour faciliter le processus tant en Afrique qu'aux Nations Unies, à New York.

Tout au long du processus de paix, le Canada a fourni un soutien financier et diplomatique. Il a plus particulièrement contribué à faire de l'égalité des sexes un élément crucial dans les pourparlers de paix sur le Darfour et aidé l'Union africaine à intégrer les préoccupations pour l'égalité des sexes à l'accord de paix. L'Accord de paix sur le Darfour marque un progrès notable sur des enjeux importants comme la participation à la vie politique, le partage des richesses, la réponse aux besoins en matière d'aide humanitaire, de développement et d'infrastructures, l'intégration des anciens combattants dans les forces de sécurité, l'instauration de la démocratie, l'aide aux personnes déplacées et, ce qui est le plus important, l'élimination des violences et des viols.

Le Canada félicite de ses efforts inlassables l'équipe de médiation de l'Union africaine, qui a contribué aux progrès accomplis jusqu'à maintenant. Une entente n'est qu'un premier pas. Sa mise en oeuvre et la réconciliation doivent suivre rapidement. Le Canada accordera son appui à l'une comme à l'autre. Dans le cadre de ses efforts pour promouvoir la paix et mettre un terme à l'impunité au Darfour, le Canada préconise instamment le renvoi de la situation du Darfour par le Conseil de sécurité de l'ONU, à la Cour pénale internationale. Il a été le premier et le seul pays à faire une contribution volontaire de 500 000 $ pour appuyer la tenue d'une enquête. Il se félicite de la décision du Conseil de sécurité, dans laquelle il voit une mesure importante pour s'attaquer aux crimes graves que toutes les parties auraient commis au Darfour. Nous avons bon espoir que l'enquête de la Cour pénale internationale contribuera à l'instauration d'une paix durable pour les habitants du Darfour.

Le Canada a appuyé l'instauration de la paix et de la sécurité au Darfour. L'Union africaine a joué le premier rôle dans les efforts de règlement du conflit en déployant une force multinationale de plus de 7 700 militaires, policiers et civils. La mission de l'Union africaine au Soudan, la MUAS, vise à inciter les parties à respecter leurs ententes, à mettre un terme aux attaques contre les populations civiles et à établir les conditions nécessaires à la mise en oeuvre d'accords politiques. Le Canada a joué un rôle de premier plan, reconnu à l'échelle internationale, pour soutenir la mission de maintien de la paix de l'Union africaine. Cette intervention était motivée par les principes de la responsabilité de protéger et leur était conforme.

La contribution du Canada à la mission est actuellement parmi les plus substantielles. Elle totalise 170 millions de dollars en aide logistique, en financement et en équipement, dont la mission a besoin pour s'acquitter de son mandat. Le Canada a fourni des hélicoptères, des avions et des véhicules blindés pour le transport des troupes, afin d'assurer la mobilité nécessaire à l'efficacité de la force. Nous continuons également à envoyer des policiers militaires et des experts civils pour contribuer au bon déroulement des opérations. Dans le cadre de sa mission, l'Union africaine a réalisé beaucoup dans des circonstances extrêmement difficiles qui auraient mis à rude épreuve même les forces internationales les plus expérimentées et les mieux équipées, mais l'Union africaine et la communauté internationale ont reconnu que le moment était bien choisi pour une nouvelle phase de l'engagement international.

(1500)

La situation exige un niveau d'engagement international plus élevé et elle a amené l'Union africaine à demander aux Nations Unies d'entreprendre de planifier la transition pour qu'une mission des Nations Unies prenne le relais. Cette mission intégrera la force de maintien de la paix à un effort permanent sur les plans humanitaire et politique et en matière de développement et de maintien de la paix pour pouvoir agir avec cohésion. Le travail de planification des Nations Unies est bien engagé. Nous nous félicitons du fait que l'Union africaine ait présenté cette demande à l'ONU. Nous continuerons à collaborer étroitement avec les deux organisations et avec nos partenaires internationaux pour fournir le soutien nécessaire au succès de l'opération.

La mission des Nations Unies pourra assurer un meilleur accès à l'aide humanitaire, accès qui, jusqu'ici, a été limité d'une façon inadmissible, ce qui a mis en danger la vie de centaines de milliers de Darfouriens qui dépendent de cette aide pour survivre.

Le Canada continue d'exhorter le gouvernement du Soudan à garantir un accès sans restriction aux travailleurs humanitaires, comme il en avait convenu précédemment, pour que la communauté internationale puisse acheminer l'aide vers les endroits qui en ont besoin.

Le Canada demeure profondément inquiet de la persistance de la violence et de l'impunité au Darfour, et particulièrement des agressions sexuelles contre les civils. Nous avons essayé de faire inscrire la protection des civils dans le mandat de toutes les missions de maintien de la paix de l'ONU, et sommes heureux de constater que cela s'est fait dans les sept derniers cas, y compris celui de la mission au Soudan. Cet important élément doit être maintenu dans le mandat de la nouvelle mission.

Le mandat de l'actuelle mission de l'Union africaine au Soudan comprend la surveillance et l'observation, la participation à des mesures de rétablissement de la confiance et la création d'un environnement sûr. Il prévoit en outre le recours à la force pour protéger les civils en cas de menace imminente de violence, un peu comme le prévoit le chapitre VII de la Charte des Nations Unies. Le Canada travaillera pour s'assurer que le mandat d'une éventuelle force des Nations Unies soit tout aussi robuste.

Nous appuyons la mise en œuvre pleine et opportune de toutes les mesures convenues par le Conseil de sécurité, y compris le recours à des sanctions ciblées, compte tenu de la gravité de la situation des droits de la personne et de la situation humanitaire au Darfour.

Le Canada se félicite de la récente désignation de quatre personnes pour des sanctions ciblées comme première mesure. Ceux qui entravent le processus de paix ou qui menacent la stabilité au Darfour et dans la région ne peuvent pas rester impunis. Dans le cadre de notre approche globale du pays, nous surveillons étroitement la situation dans le Soudan oriental et reconnaissons la nécessité de la poursuite des pourparlers de paix.

La situation humanitaire dans cette région est très inquiétante. Encore une fois, le Canada demande, pour les organismes internationaux d'aide, un accès sans restriction à ceux qui en ont besoin au Soudan. Le Canada travaille également à la promotion de la stabilité à long terme et à la reconstruction du pays en contribuant à la création de nouvelles institutions gouvernementales et en favorisant le fédéralisme.

Nous aidons les organisations de la société civile et les réseaux communautaires locaux de la base à réaliser des projets de promotion des droits de la personne, de la bonne gouvernance, de l'accès à la justice et de règlement des conflits.

En conclusion, honorables sénateurs, nous travaillons en coopération avec la population du Soudan et nos partenaires internationaux pour assurer au Soudan un avenir pacifique, démocratique et prospère. Cela constitue un impératif pour le Soudan, un objectif essentiel pour la paix en Afrique et une priorité pour le Canada.

[Français]

L'honorable Roméo Antonius Dallaire : Honorables sénateurs, madame le sénateur accepterait-elle une question sur le contenu de sa présentation qui reflète la participation historique du Canada? Comme tellement d'autres pays développés, nous sommes en retard, car les gens du Darfour ont déjà souffert presque deux ans avant le début de cette mouvance d'aide et de sécurité. Nous avons décidé non pas d'intervenir mais au contraire d'appuyer l'Union africaine. Pour une des premières fois, celle-ci a commencé à répondre à l'urgence de sécurité dans ce pays.

Comme vous l'avez indiqué, la capacité de l'Union africaine est maintenant très limitée. Nous pouvons soutenir l'opération. Dans ce contexte, le besoin urgent des Nations Unies d'être sur place ne peut être minimisé, or, tout de même, six millions de gens vivent dans l'extrême misère et demeurent encore victimes de viols et d'attaques par des éléments subversifs.

Ne croyez-vous pas que le Canada, ayant joué un rôle d'appui pour l'Union africaine, exigera un mandat plus robuste et un déploiement beaucoup plus concret et spécialisé? Avec un scénario où les Nations Unies seront en place, le Canada ne devrait-il pas maintenant mettre de l'avant une compétence militaire intégrée au travail humanitaire qui se fait sur le terrain?

[Traduction]

Le sénateur Nancy Ruth : Je crois savoir qu'il appartient aux Nations Unies de décider et que le Canada a l'intention d'appuyer la décision qui sera prise.

Le sénateur Dallaire : Cela est techniquement exact, sauf que lorsque l'ONU prépare une mission, elle prend contact à titre informel avec les pays donateurs pour déterminer lesquels sont disposés à participer à la force. Ces discussions informelles ont lieu parallèlement à l'examen du mandat au Conseil de sécurité. Une fois le mandat approuvé, une demande officielle est adressée aux pays qui se sont montrés prêts à déployer des troupes.

Ne pensez-vous pas que le Canada devrait, aussi bien dans le cadre du processus informel qu'officiellement, offrir des capacités pouvant soutenir une force composée de troupes de pays en développement qui n'ont ni les compétences ni l'équipement nécessaires pour faire un bon travail?

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, le temps de parole du sénateur Nancy Ruth étant écoulé, le Sénat est-il disposé à lui accorder cinq minutes de plus?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Nancy Ruth : Je crois que tous les sénateurs présents s'intéressent aux observations du sénateur Dallaire. Je sais que le Canada se classe au troisième rang parmi les donateurs qui participent au processus de paix au Darfour. C'est une situation que le gouvernement suit de très près, de minute en minute.

(Sur la motion du sénateur Fraser, le débat est ajourné.)

LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

LE CENTRE DES ARMES À FEU—L'ABOLITION DU REGISTRE DES ARMES D'ÉPAULE—LA DÉCLARATION DU MINISTRE—DÉPÔT DE DOCUMENTS

Permission ayant été accordée de revenir au dépôt de documents :

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, en réponse à la question du sénateur Murray, je souhaite déposer un communiqué de presse publié plus tôt aujourd'hui par M. Stockwell Day, ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, ainsi que des questions, des réponses et des statistiques relatives au registre des armes d'épaule et aux changements apportés au programme des armes à feu.

LE SÉNAT

MOTION TENDANT À AUTORISER LA TÉLÉDIFFUSION DES DÉLIBÉRATIONS—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Segal, appuyée par l'honorable sénateur Keon :

Que, lorsque le Sénat siège, les délibérations de la Chambre haute, à l'instar de celles de la Chambre basse, soient télédiffusées ou autrement enregistrées sur bandes vidéo afin d'être diffusées en direct ou rediffusées sur CPAC ou une autre station de télévision à des moments opportuns pour les Canadiens.—(L'honorable sénateur Fraser)

L'honorable Jim Munson : Ici le sénateur Jim Munson, qui vous parle en direct du Sénat.

Cela ne vous encourage-t-il pas, honorables sénateurs, ou peut- être cela vous effraie-t-il?

(1510)

Honorables sénateurs, maintenant que j'ai votre attention, nous avons entendu mon ami, le sénateur Hugh Segal, proposer il y a un mois une motion portant sur la télédiffusion des délibérations du Sénat. Je désire intervenir en faveur de cette motion.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Munson : J'aborde cette question sous deux angles. Premièrement, je l'aborde du point de vue d'un ancien journaliste et d'une personne qui croit fermement à la transparence au sein de nos institutions démocratiques. Deuxièmement, je l'aborde du point de vue un peu plus égoïste d'un sénateur qui veut renforcer cette fière institution et sensibiliser davantage les Canadiens au bon travail que nous faisons ici. Certains sénateurs rient.

Le premier point, celui de la transparence, est vital. Plus que jamais, les Canadiens attendent des parlementaires qu'ils rendent des comptes, qu'ils montrent ouvertement ce qu'ils font pour faire du Canada un pays meilleur. Cela est tout à fait raisonnable, et nous avons la technologie et les moyens à notre disposition pour répondre à cette attente.

Il est dans l'intérêt de tous que le public soit bien informé. Les médias imprimés font connaître une partie de ce que nous faisons au Sénat, mais notre travail réel est filtré par les journalistes, les rédacteurs et les producteurs qui décident de ce qui vaut la peine d'être diffusé. Cela ne correspond pas à la transparence que désirent les Canadiens.

Je crois que la radiodiffusion de nos débats rendrait le processus plus transparent et que notre institution en sortirait plus forte. Je crois aussi que la télédiffusion, la radiodiffusion, la diffusion sur le web, sans oublier la plus récente forme de diffusion et — j'en suis sûr — la plus populaire auprès de mes collègues, la baladodiffusion de nos débats, renforceront notre institution parce que les débats que nous tenons seront de plus grande qualité.

Nous savons ce qui fait du Sénat une institution unique en son genre. Notre assemblée est représentative des différentes régions. Nous avons une meilleure représentation des femmes et des Autochtones. Le Sénat bénéficie de la richesse de la somme de nos expériences personnelles et professionnelles, qui sont souvent autres que politiques, et aucun d'entre nous n'est motivé par le désir d'être réélu quand il explique sa position sur un projet de loi ou une politique.

Je crois que ces qualités élèvent le ton et élargissent la portée de nos débats. Prenons, par exemple, le débat sur la recherche sur les cellules souches, qui a eu lieu au Sénat il y a un certain temps. Quand j'ai entendu les anciens sénateurs Morin et Roche traiter du projet de loi de façon aussi érudite, j'ai été profondément ému par ce qu'ils disaient. C'était un enjeu complexe, et ce qu'ils disaient m'a beaucoup éclairé. Je pourrais donner de nombreux autres exemples. Quand je suis arrivé ici, je me suis considéré chanceux et j'ai été ému d'entendre l'ancien sénateur Chalifoux parler des droits des Autochtones et le sénateur Keon parler de sa passion pour la réforme des soins de santé.

Tous les Canadiens auraient intérêt à entendre ces débats. Les Canadiens verraient que le travail que nous accomplissons ici se concentre davantage sur ce qui serait le mieux pour notre pays et que les débats sont remarquablement moins partisans. Il arrive souvent que des représentants de différents partis s'entendent sur certaines questions, et mon appui à la motion du sénateur Segal n'en est qu'un exemple. Notre relation de travail est unique et durable, et cela donne lieu à des débats très constructifs.

Je sais qu'on s'inquiète du fait que des sénateurs pourraient profiter du fait qu'ils sont devant les caméras pour se montrer à leur avantage, pour faire du spectacle. Mon expérience de la télévision m'amène à vous dire que ce ne sera pas le cas. Je regrette de vous informer qu'en faisant entrer les caméras au Sénat, nous rendrons mieux compte de notre travail, mais nous ne gagnerons pas de prix Gémeaux. Nous pourrions toutefois recevoir quelques lettres de remerciement venant d'insomniaques qui ont trouvé le sommeil en suivant certains de nos débats et discussions les plus arides.

L'idée est que le Sénat n'est pas un club privé. C'est un endroit où des gens raisonnables tiennent des propos réfléchis qu'il serait bon de communiquer aux Canadiens. J'appuie de tout cœur la motion du sénateur Segal et j'exhorte tous les sénateurs à faire de même.

Un seul aspect de cette question me préoccupe, soit les exigences logistiques de la télédiffusion de nos délibérations. Cela pourrait donner lieu à un vif débat qui dure pendant des mois. Je pense qu'un comité doit se pencher au plus tôt sur la question. Par exemple, nous pourrions tenter l'expérience de télédiffuser la période des questions seulement pour voir comment les choses se présentent.

Honorables sénateurs, cette question doit être soumise à un comité qui en établira les coûts, la logistique et les avantages. Grâce au rapport de ce comité, les sénateurs seront mieux en mesure de débattre la question qu'ils ne le sont maintenant. Il nous faut passer au futur. Or, le futur, c'est maintenant et la télédiffusion aussi. La télédiffusion des délibérations du Sénat doit se faire. Elle se fait déjà dans les assemblées publiques et dans les réunions des conseils municipaux partout au Canada. Les Canadiens suivent les travaux de leurs représentants en politique. De quoi avons-nous peur? Laissons entrer les caméras.

MOTION D'AMENDEMENT

L'honorable Jim Munson : Par conséquent, je propose :

Que, conformément au paragraphe 48(1) du Règlement, la question soit renvoyée au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, la motion est tout à fait recevable puisque, conformément au paragraphe 48(1) du Règlement, quand une question est débattue au Sénat, un sénateur peut proposer un amendement à cette motion, mais peut aussi proposer que la question débattue soit renvoyée à un comité sénatorial permanent. C'est ce que le sénateur Munson vient de faire.

Par conséquent, il me revient de la mettre aux voix formellement. Le sénateur Munson, avec l'appui du sénateur Peterson, propose que, conformément au paragraphe 48(1) du Règlement, la question soit renvoyée au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement.

Cette motion peut maintenant être débattue ou le débat peut être ajourné. La question est maintenant soumise au Sénat.

L'honorable Terry Stratton : Il y a un problème ici, Votre Honneur. Normalement, dans un tel cas, à titre de Président, vous vous levez et déclarez que si le dernier sénateur qui a parlé a fait une déclaration, cela a pour effet de clore le débat; l'avez-vous fait, Votre Honneur?

Son Honneur le Président : Non, j'ai expliqué la procédure correctement, c'est-à-dire que lorsqu'une question est soumise au Sénat, comme c'est le cas ici, la question peut être amendée par le sénateur qui a alors la parole, ou la question peut être renvoyée au moyen d'une motion proposée par le sénateur qui a la parole. C'est ce qui a été fait.

La motion qui est soumise au Sénat vise le renvoi de la question au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement. Elle peut notamment être débattue, être amendée ou le débat peut être ajourné, ou autre.

(Sur la motion du sénateur Tkachuk, le débat est ajourné.)

(1520)

PEUPLES AUTOCHTONES

MOTION TENDANT À AUTORISER LE COMITÉ À EXAMINER LES PRÉOCCUPATIONS GÉNÉRALES DES PREMIÈRES NATIONS DU CANADA CONCERNANT LE PROCESSUS FÉDÉRAL DE RÈGLEMENT DES REVENDICATIONS PARTICULIÈRES—REPORT DU DÉBAT

À l'appel de la motion no 63, par l'honorable sénateur St. Germain :

Que, conformément à l'article 86(1)q) du Règlement du Sénat, le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones soit autorisé à examiner, pour en faire rapport, les préoccupations générales des Premières nations du Canada concernant le processus fédéral de règlement des revendications particulières, la nature et le statut de la politique du gouvernement du Canada sur le règlement des revendications particulières, l'administration actuelle de cette politique, le statut de la Commission sur les revendications particulières des Indiens et d'autres questions pertinentes en vue de la présentation de recommandations qui contribueront au règlement adéquat, en temps utile, des griefs des Premières nations découlant à la fois des traités conclus avec la Couronne fédérale et de l'administration, par le gouvernement du Canada, de leurs terres, de leur argent et d'autres affaires en vertu de la Loi sur les Indiens;

Que le Comité fasse périodiquement rapport au Sénat, au plus tard le 14 juin 2007, et qu'il conserve jusqu'au 1er septembre 2007 tous les pouvoirs nécessaires pour diffuser ses conclusions.

L'honorable Mac Harb : Si les honorables sénateurs, et tout particulièrement le sénateur St. Germain, examinent la motion telle qu'elle est, notamment la ligne où on dit « d'autres questions pertinentes », je voudrais y insérer un amendement amical qui serait le suivant :

Étant donné que certaines revendications précises découlent de la possibilité que le gouvernement du Canada enfreigne ou ne respecte pas les obligations légales prévues dans les traités, le gouvernement du Canada doit reconnaître le fait historique que les membres des Premières nations indiennes et inuites ont été les premiers à habiter le pays et à exploiter ses ressources naturelles comme la fourrure et le bois, à cultiver le maïs et à tracer des sentiers dans les régions sauvages; dans l'Arctique, une reconnaissance supplémentaire du fait que...

Son Honneur le Président : Sénateur Harb, si vous voulez que nous nous penchions sur le sujet, quelqu'un doit proposer la motion. Elle n'a pas encore été proposée.

Le sénateur Harb : Je l'ai vue dans le Feuilleton.

Son Honneur le Président : D'accord, mais elle doit être proposée. Voulez-vous proposer la motion?

Le sénateur Harb : Oui.

Son Honneur le Président : Vous la proposez au nom du sénateur St. Germain?

Le sénateur Harb : Non, en mon nom.

Son Honneur le Président : C'est que c'est sa motion. Je veux simplement être utile. Je crois qu'il est préférable que la question soit reportée et que nous laissions le parrain de la motion la proposer.

(Le débat est reporté.)

FINANCES NATIONALES

AUTORISATION AU COMITÉ DE RECEVOIR LES MÉMOIRES RECUEILLIS ET LES TÉMOIGNAGES ENTENDUS LORS DE LA TRENTE-HUITIÈME LÉGISLATURE DANS LE CADRE DE SON ÉTUDE DU BUDGET DES DÉPENSES 2005-2006

L'honorable Joseph A. Day, conformément à l'avis du 16 mai 2006, propose :

Que les mémoires reçus, les témoignages entendus et les travaux accomplis par le Comité sénatorial permanent des finances nationales au cours de la première session de la trente-huitième législature dans le cadre de son étude du Budget des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2006 soient renvoyés au Comité pour les fins de son étude du Budget des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2007, tel qu'autorisée par le Sénat le mercredi 26 avril 2006.

— Honorables sénateurs, je ne pense pas qu'il faille discuter très longtemps de la motion. Si quelqu'un a une question, je serai heureux d'y répondre. La motion permettrait que les témoignages entendus et les documents recueillis par le Comité sénatorial permanent des finances nationales l'an dernier, avant les élections, soient renvoyés à notre comité pour son étude du budget de cette année.

Nous voulons faire certaines comparaisons. Nous voulons aussi que soient renvoyés à notre comité les travaux faits à la dernière législature, lorsque nous avions le mandat d'étudier le budget précédent.

L'honorable Anne C. Cools : Honorables sénateurs, je suis disposée à accepter la motion, mais pour que le Sénat puisse communiquer des documents à un comité, il faudrait qu'il les ait. Beaucoup de cela se passe présentement, honorables sénateurs.

Je voudrais exhorter l'ensemble des comités à prévoir, lorsque leurs travaux achèvent ou que nous approchons d'une dissolution des Chambres ou d'une prorogation, de présenter un rapport provisoire de deux ou trois paragraphes au Sénat. Le Sénat serait alors en possession de tous les témoignages. J'attendais le moment de faire cette mise au point. Peut-être devrais-je le faire de façon plus officielle. Ce serait la bonne façon de faire les choses. Nous communiquons souvent à des comités des documents que nous n'avons pas en notre possession. Lorsque je fais partie d'un comité, j'insiste toujours pour qu'il présente de tels rapports au Sénat — et, sénateur Day, nous vous pousserons à le faire — pour que le Sénat reçoive l'information, information que les comités demanderont plus tard au Sénat de leur communiquer.

Son Honneur le Président : Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Français]

LOI ANTITERRORISTE

AUTORISATION AU COMITÉ SPÉCIAL DE SE RÉUNIR DURANT L'AJOURNEMENT DU SÉNAT

L'honorable Pierre Claude Nolin, conformément à l'avis du 16 mai 2006, propose :

Que, en conformité avec l'article 95(3) du Règlement, le Comité sénatorial spécial sur la Loi antiterroriste soit autorisé à se réunir le lundi 29 mai 2006, même si le Sénat est ajourné à ce moment pour une période de plus d'une semaine.

— Honorables sénateurs, je suis prêt à répondre aux questions de collègues mais je pense que cette motion est évidente. Il s'agit d'entendre le témoignage d'un ou deux ministres. Nous ne savons pas encore à quelle heure nous les entendrons, mais si nous pouvions avoir la permission de cette Chambre, nous le ferions le 29 mai prochain.

L'honorable Fernand Robichaud : Honorables sénateurs, n'avons- nous pas déjà adopté une motion à cet effet?

Le sénateur Nolin : Je ne pourrais pas répondre à cette question.

L'honorable Joan Fraser (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, si ma mémoire est bonne, la motion adoptée ne s'applique pas aux comités spéciaux et ce comité est un comité spécial.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

LE SÉNAT

MOTION TENDANT À PRESSER LE GOUVERNEMENT À PROMOUVOIR L'INTERDICTION DE TOUTE FUMÉE DANS LES LIEUX DE TRAVAIL ET LES LIEUX PUBLICS—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Mac Harb, conformément à l'avis du 16 mai 2006, propose :

Que le Sénat prenne acte du fait que le tabagisme continue chaque année de causer la mort d'environ 45 000 Canadiens et de coûter jusqu'à 15 milliards de dollars à notre économie;

Que le Sénat note que la législation fédérale prévoit actuellement des options d'aération et des salles de fumeurs dans les lieux de travail de compétence fédérale, même si ces mesures n'offrent pas une protection complète contre la fumée secondaire, et que pour offrir une protection complète contre la fumée secondaire, il faudrait que les lieux de travail et les lieux publics soient tout à fait exempts de fumée;

Que le Sénat presse le gouvernement canadien d'adopter des mesures législatives interdisant toute fumée dans les lieux de travail et lieux publics fermés qui relèvent de sa compétence;

Que le Sénat demande au gouvernement du Canada de demander à chaque province et territoire qui ne l'a pas encore fait d'adopter des mesures législatives détaillées contre le tabagisme;

Qu'un message soit envoyé à la Chambre des communes pour lui demander de faire front commun avec le Sénat aux fins de ce qui précède.

— Honorables sénateurs, je suis honoré de prendre la parole aujourd'hui pour vous prier d'appuyer une motion visant à actualiser la législation qui protège les Canadiens contre les dangers de la fumée secondaire. Je remercie le sénateur Keon d'avoir appuyé la motion.

Nous demandons précisément au gouvernement fédéral de mettre en place, dans l'ensemble du pays une interdiction sur l'usage, dans les espaces publics et les lieux de travail clos dont il est responsable, des produits du tabac qui produisent de la fumée.

Au Canada, la santé publique et la santé et la sécurité au travail relèvent de la compétence des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, et certaines responsabilités sont transférées aux municipalités. C'est pourquoi la motion invite également les gouvernements des provinces et des territoires qui n'ont pas encore adopté des mesures appropriées pour protéger leurs citoyens à le faire.

Honorables sénateurs, imaginez-vous pendant un moment que nous sommes en 1985 dans la salle du Sénat, et que nous nous préparons à participer aux travaux à l'ordre du jour. À part la largeur des cravates et la longueur des jupes, peu de choses ont changé depuis 1985 dans ces enceintes historiques. Les libéraux seraient assurément en majorité dans la salle, comme aujourd'hui. Toutefois, nous n'y respirerions pas un air aussi pur. Certains estimés collègues se souviendront que, jusqu'à la fin des années 1980, beaucoup de personnes fumaient dans les bureaux, les couloirs et les salles de réunion sur la Colline du Parlement.

[Français]

Il est très clair pour moi que d'interdire l'usage du tabac à la Cité parlementaire était la bonne chose à faire, et la plupart d'entre nous reconnaîtront qu'il convient dorénavant d'appliquer cette mesure dans tous les lieux de travail et les espaces publics clos au Canada.

À l'heure actuelle, la Loi canadienne sur la santé des non-fumeurs réglemente l'usage du tabac dans les édifices fédéraux, sur les propriétés fédérales ainsi que sur les terres gérées par le gouvernement fédéral. La loi s'applique notamment aux lieux de travail et aux établissements comme aux institutions financières, les aéroports, les avions, les trains interprovinciaux et les installations de télécommunication.

[Traduction]

La Loi sur la santé et la sécurité au travail et son règlement d'application, qui ont déjà 20 ans, permettent toutefois encore des salles ou des zones fumeurs dans bon nombre des lieux de travail et des espaces publics sous réglementation fédérale. Cette loi dépassée met en danger la santé des Canadiens.

(1530)

Prenons un moment pour réfléchir au plus grave problème de santé au Canada, qui tue plus de Canadiens que les accidents de voiture, les meurtres, les suicides et l'alcool combinés : l'usage du tabac. En effet, 45 000 décès sont attribuables à la cigarette chaque année au Canada, dont des milliers chez les non-fumeurs atteints d'une maladie cardiaque ou d'un cancer du poumon lié à la fumée de cigarette.

Les preuves des risques liés à l'inhalation de la fumée secondaire sont trop convaincantes pour qu'on n'en tienne pas compte. Les honorables sénateurs seront peut-être surpris d'apprendre que cette fumée est encore plus toxique que celle qui est inhalée directement car elle n'est pas du tout filtrée. Elle contient 4 000 substances chimiques dont au moins 50 causent le cancer ou prédisposent à cette maladie. L'Environmental Protection Agency des États-Unis a classé la fumée secondaire dans les carcinogènes de catégorie A, ce qui signifie qu'il n'existe aucun niveau sûr d'exposition à ce type de fumée.

Des organisations très respectées comme Médecins pour un Canada sans fumée, la Société canadienne du cancer, la Canadian Coalition for Action on Tobacco et le Canadian Global Forum on Tobacco Control demandent une interdiction de la fumée secondaire dans l'ensemble du pays

En 2004, l'Irlande a été le premier pays au monde à interdire l'usage du tabac dans les lieux de travail et les espaces publics clos. Elle a été suivie par la Norvège, la Nouvelle-Zélande, le Bhoutan et l'Écosse, et une vingtaine d'autres pays se préparent actuellement à adopter une telle mesure.

[Français]

Les gouvernements des provinces et des territoires doivent s'efforcer activement de protéger les personnes qui sont exposées malgré elles à la fumée de tabac ambiante dans les lieux de travail et les espaces publics fermés.

Les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de la Santé se sont engagés à travailler de concert pour réduire la consommation de tabac au Canada. Offrir des lieux de travail et des espaces publics sans fumée doit nécessairement faire partie de cet engagement.

Bon nombre d'entre vous savent que le Canada a été l'un des premiers pays à ratifier la Convention-cadre pour la lutte antitabac de l'Organisation mondiale de la santé adoptée en novembre 2004. En qualité de partie à cette convention, le Canada a convenu d'observer l'article 8, qui prescrit ce qui suit :

Chaque Partie adopte et applique, dans le domaine relevant de la compétence de l'État en vertu de la législation nationale, et encourage activement, dans les domaines où une autre compétence s'exerce, l'adoption et l'application des mesures législatives, exécutives, administratives et/ou autres mesures efficaces prévoyant une protection contre l'exposition à la fumée du tabac dans les lieux de travail intérieurs, les transports publics, les lieux publics intérieurs et, le cas échéant, d'autres lieux publics.

[Traduction]

Dans l'ensemble, honorables sénateurs, le Canada est en bonne voie de répondre à ces exigences. Voici ce qu'indiquait à cet égard le rapport de suivi de la Convention-cadre pour la lutte antitabac, publié en février 2006 :

Au Canada, tous les paliers de gouvernement ont donné un appui politique et financier aux initiatives de lutte contre le tabagisme, qui ont contribué à réduire considérablement l'usage du tabac ces dernières années.

Le nombre de fumeurs diminue au Canada, puisqu'il n'était plus que de 20 p. 100 en 2005, de même que le nombre d'adolescents qui commencent à fumer, bien qu'il demeure élevé. Nous devons pousser plus loin notre stratégie de lutte afin de poursuivre ces réussites.

Honorables sénateurs, la ville où nous résidons au moins à temps partiel ces temps-ci est sans fumée. La ville d'Ottawa a en effet interdit l'usage du tabac dans les lieux de travail et les espaces publics clos il y a presque cinq ans. Beaucoup d'entre vous viennent de villes ou de localités qui ont également pris cette mesure pour protéger les travailleurs et les Canadiens des dangers de la fumée secondaire.

Il importe de souligner que les politiques d'interdiction du tabac ne font pas que protéger les travailleurs. Elles contribuent également à réduire globalement la consommation de tabac. Elles font prendre conscience des méfaits du tabagisme et modifient les opinions des gens sur cette habitude.

Dans l'ensemble des provinces et des territoires du Canada, le mouvement de création et de conservation d'espaces sans fumée fait son chemin. À l'heure actuelle, 27 p. 100 des Canadiens vivent dans des localités où les lois provinciales, territoriales ou municipales protègent la population de l'exposition à la fumée secondaire dans les lieux publics, y compris les bars et les restaurants.

D'ici le 1er janvier 2007, 80 p. 100 des Canadiens bénéficieront de ce degré de protection. Toutefois, 20 p. 100 n'y auront pas encore droit et un nombre inacceptable de ces travailleurs non protégés relèvent de la compétence fédérale.

La plupart des employés fédéraux ne sont pas exposés à la fumée secondaire grâce à la politique du Conseil du Trésor ou parce que leur employeur respecte l'interdiction de fumer au travail émise par la province ou la municipalité. D'autres employés n'ont cependant pas cette chance. Encore aujourd'hui, une protection moins grande est assurée dans une partie des bâtiments et installations sous réglementation fédérale comme les aéroports que dans les municipalités où ils sont situés.

Honorables sénateurs, vous n'avez qu'à vous rendre à l'aéroport international d'Ottawa pour le constater. Je le répète, la ville d'Ottawa interdit l'usage du tabac depuis 2001, mais l'aéroport, qui compte deux fumoirs, constitue une exception flagrante, car il relève du gouvernement fédéral pour ce qui touche les questions de santé et de sécurité. À l'entrée en vigueur de la nouvelle loi ontarienne, le 31 mai 2006, les fumoirs seront conservés à l'aéroport d'Ottawa et dans ceux des autres régions du pays, car ces installations sont régies par le gouvernement fédéral. Nous devons prendre les mesures législatives voulues pour interdire l'usage du tabac dans les aéroports et dans tous les autres lieux qui relèvent de la compétence fédérale.

À l'instar d'autres pays, le gouvernement fédéral doit adopter des normes plus strictes. Il devra réviser la Loi sur la santé des non- fumeurs ou le Code canadien du travail, ou les deux, afin d'interdire l'usage du tabac dans tous les lieux de travail et les espaces publics intérieurs réglementés par le gouvernement fédéral.

[Français]

Le Yukon, l'Alberta, la Colombie-Britannique, l'Île-du-Prince- Édouard, Terre-Neuve et la Saskatchewan doivent aussi assurer une meilleure protection contre la fumée secondaire et interdire l'usage du tabac dans tous les lieux de travail et les espaces publics qui relèvent de leur compétence. Nous devrions les encourager en ce sens.

J'aimerais ajouter, honorables sénateurs, qu'au moment de modifier les lois, il faudra tenir compte de l'importance culturelle du tabac dans la vie des Autochtones du Canada, et de son rôle cérémonial dans leurs pratiques culturelles et spirituelles.

Santé Canada a fait un excellent travail en fournissant des ressources et des informations sur les lieux de travail et les espaces publics exempts de fumée. Le ministère s'est aussi employé assidûment à faire connaître à la population canadienne les dangers des produits du tabac et de la fumée secondaire.

[Traduction]

La plupart d'entre vous connaissent la courageuse responsable de la campagne Un Canada sans fumée, Heather Crowe. Mme Crowe a participé à des publicités diffusées à la télévision et son histoire a été publiée dans les journaux. Bien qu'elle n'ait jamais fumé, elle mourra prochainement d'un cancer du poumon après avoir travaillé pendant des années comme serveuse dans des restaurants remplis de fumée.

Voici quelle a été sa réponse lorsque je l'ai informée que la motion serait débattue au Sénat :`

J'ai été très heureuse d'apprendre que vous allez déposer au Sénat une motion proposant qu'il soit interdit de fumer dans tous les lieux de travail et les espaces publics. De grands progrès ont été accomplis, mais beaucoup de Canadiens ne sont toujours pas protégés contre la fumée secondaire au travail. Je souhaite être la dernière personne à mourir pour cette raison. Votre motion contribuera à la réalisation de mon souhait.

Honorables sénateurs, des personnes comme Heather Crowe, des groupes comme Médecins pour un Canada sans fumée et les organisations internationales comme l'Organisation mondiale de la Santé nous enjoignent de corriger les lacunes actuelles et d'offrir un air plus pur aux non-fumeurs de notre pays.

Je prie les honorables sénateurs d'appuyer la motion afin que les dispositions nécessaires soient prises pour actualiser la législation actuelle pour la santé des non-fumeurs au Canada. Il n'y a aucune raison de ne pas adopter cette mesure, mais il existe une foule de bonnes raisons de le faire. Croyez-moi, nous respirerons tous plus à l'aise une fois la motion adoptée.

Honorables sénateurs, je vous saisis de cette motion avec l'appui de mon éminent collègue, le sénateur Keon, dans l'espoir que nous puissions l'adopter rapidement et envoyer ainsi un message à l'autre endroit pour demander aux députés de se joindre à nous pour veiller à ce que les lieux de travail et les espaces publics du Canada soient vraiment sans fumée.

(Sur la motion du sénateur Tkachuk, le débat est ajourné.)

(Le Sénat s'ajourne au jeudi 18 mai 2006, à 13 h 30.)